"Je ne veux pas l'habituer"...
C'est la phrase d'une collègue qui me rendait visite avec son adorable bébé de 2 mois. Elle m'expliquait prendre très peu sa fille dans ses bras tout au long de la journée, "pour ne pas l'habituer".
Bien sûr je n'ai rien dit, je n'ai pas trouvé les mots. C'est une nouvelle maman, manifestement très différente de moi dans ses attentes: elle a accouché dans une maternité de niveau 3 et moi à la maison.
Mais je n'ai pas pu m'empêcher d'être triste de la voir ainsi se priver, par principe, de ce contact si précieux avec son tout-petit.
Que craint-elle ainsi ? Que son enfant prenne goût à ses bras, retrouve ainsi la continuité du contact fusionnel de la grossesse ? Qu'il manifeste ensuite trop vivement son besoin d'être bercé et caliné alors qu'elle est occupée à autre chose ?
J'ai alors pris conscience que sa manière de faire est très occidentale, très récente aussi dans l'histoire de l'humanité. Le bébé passe du landau au transat puis du cosy au lit. Il dort dans une chambre éloignée, surveillé par baby phone... L'indutrie de la puériculture s'en réjouit.
Le corps de la maman suffit pourtant, la plupart du temps, à répondre à tous les besoins d'un enfant: ses seins pour le lait, ses bras pour le porter (un porte-bébé tout simple permet de rester disponible tout en satisfaisant son besoin de contact), tout son corps pour l'apaiser, l'amuser, l'éveiller.
Cette façon de materner est vieille comme le monde et se retrouve dans toutes les parties du globe...
J'ai lu un livre intéressant sur le sujet, il s'agit de l'essai de Jean Liedloff: le Concept de Continuum: à la recherche du bonheur perdu.
A travers son étude de la tribu des Yekwanas, Jean y dénonce les théories ou pratiques occidentales visant à séparer très tôt le nourrisson de sa mère. Elle cherche à démontrer la nécessité de conserver le contact physique mère-enfant jusqu'à ce que l'enfant s'en détache tout seul.
Elle prouve que lorsque son besoin de sécurité, de contact, de fusion avec sa mère est totalement satisfait, l'enfant se détache naturellement et part, fort de cette confiance ancrée en lui, à la découverte du monde.
Il ne passera pas sa vie à rechercher, à travers la compétition, les excès et les dépendances, l'amour et la présence qu'il n'a pas reçu tout petit.
Alors portons-les ces petits, calinons-les, tenons-les bien contre nous, nuit et jour, tout le temps qu'il leur est nécessaire, tout le temps où ils nous font ce cadeau précieux de douceur et de confiance totale...
Car il paraît qu'ils grandissent et qu'un jour ils nous quittent et nous laissent les bras vides,... mais avec au fond du coeur le souvenir de ces moments hors du temps.