De l'amour et du désir: une question philosophique
Qui ne s'est jamais posé de questions sur l'amour ?
Ce que je ressens pour cet homme/cette femme est-il de l'amour ?
Peut-on apprendre à aimer ?
Que faire lorsque l'on n'aime plus, que l'on ne désire plus son conjoint ?
Sur cette question de l'amour et du désir, qui touche chacun d'entre nous, la philosophie a des analyses bien précieuses à nous livrer.
Elle nous permet de penser plus clairement dans le fatras de nos sentiments et de nos culpabilités.
Dans Le Banquet de Platon, Socrate décrit l'amour passion, nommé Eros.
Eros, c'est cet amour qui naît du manque. Ce manque fait naître le désir. C'est l'amour des premiers temps d'une relation: l'état amoureux.
Cet amour ne dure pas par définition car lorsque j'obtiens l'objet de mon désir, il ne me manque plus puisqu'il est là, soir et matin. Je ne le désire plus.
Ce processus peut prendre trois semaines ou trois ans. Mais inévitablement, Eros s'estompe.
C'est ainsi que l'on peut comprendre la phrase la plus triste de la philosophie:
« Ainsi la vie oscille, comme un pendule, entre la souffrance et l'ennui » *1
De la souffrance du chagrin d'amour à l'ennui du couple...
Pourtant, me diras-tu, il existe des couples heureux !
C'est qu'il existe une autre théorie de l'amour : c'est l'amour - Philia, l'amour selon Aristote et Spinoza
Philia, c'est l'amitié maritale, cet amour n'est pas manque, cet amour est joie !
« Aimer c'est se réjouir » *2
« L’amour est une joie qu'accompagne l’idée d’une cause extérieure » *3
Aimer c'est se réjouir du fait que l'être aimé existe.
Cet amour est autrement émouvant et précieux car manquer, être amoureux, est à la portée de n'importe qui. Les pires idiots savent être en manque et désirer. Mais se réjouir du cadeau bouleversant que me fait mon conjoint d'être à mes côtés depuis des années, est plus rare, mais plus durable.
Le désir, selon Spinoza n'est pas condamné à disparaître car le désir n'est pas le manque. Désirer est au contraire l'essence de l'homme.Ce n'est pas parce que quelque chose est bon que tu le désires, mais parce que tu le désires que tu l'estimes bon.
Le désir est une force qui s’affirme et poursuit son propre accroissement parce que celui-ci est vécu comme Joie.
Les sentiments qui expriment une diminution de la puissance d’exister sont du ressort de la tristesse.
Si mon désir semble en berne, si je ressens de la tristesse ou de l'angoisse, c'est que quelque chose contraint ma puissance d'exister. Que je n'ai pas une idée adéquate de mon propre désir. C'est signe que je me fourvoie. La joie doit être mon guide et la raison mon outil pour vivre en adéquation avec moi-même et avec l'autre. La tristesse, la fin de l'amour n'est pas une fatalité ! Quelle nouvelle réjouissante n'est ce pas ?
Je te recommande chaudement cet article éclairant: Le désir comme puissance d'être, sur PhiloLog.
PS: Pour être complète, il me faut mentionner le troisième amour que l'on peut concevoir mais plus difficilement réaliser: c'est Agapé
Agapé, c'est l'amour selon Jésus-Christ, l'amour désintéressé, l'amour du prochain. Ce prochain qui ne me fait pas du bien, ce prochain qui est souvent trop proche, dont la présence est si collante... Le voeu du Bodhisattva s'en approche. mais ceci est une autre histoire...
*1: Schopenhauer, Le Monde comme volonté et comme représentation
*2 Aristote, Ethique à Nicomaque
*3 Spinoza, L'Ethique