Opter pour l'amour
Après les attentats de Paris, tout le monde s'est accordé sur le fait qu'il faut continuer de vivre comme avant, de sortir de boire des coups à la terrasse des cafés entre amis, d'aller assister à des concerts.
Il s'agissait, disait-on, de ne pas accorder aux terroristes cette victoire qui consiste à vivre dans la peur, dans la haine et le désir de vengeance.
Cela a donné lieu à de bien curieuses manifestations de résistance: une bière à la main, on prenait des allures de Jean Moulin à moindre frais!
Cette année a été marquée pour moi par l'expérience de la méchanceté. J'ai dû faire face à la haine, au mépris, aux sarcasmes. Des attaques sur ce qui est le plus précieux dans ma vie: ma pratique spirituelle, mon rapport à mes enfants, ce blog...
Je n'ai pas ressenti de haine mais de l'incompréhension au départ puis une profonde tristesse.
Vis à vis de cet inconnu qui au fil des nuits instillait son venin dans l'esprit de mon mari, j'ai ressenti de l'incompréhension puis de la colère. Comment peut-on faire tant de mal? Comment ose-t-il pervertir à ce point la Voie qu'il prétend parcourir?
Glorifiant la figure du guerrier, il méprise et foule au pied cette forme d'amour qui est bienveillance, douceur et confiance. Il est bien sûr dans une ignorance crasse; mais une ignorance destructrice.
Face à ce constat, comme face aux pires horreurs dont l'homme est capable, ma première réaction est une réaction de protection.
Aimer c'est s'exposer, se rendre vulnérable. Je me suis trouvée naïve. Naïve et sans défense face à la pure méchanceté.
Mais comment vivre désormais? Dois-je porter une armure, glacer mon coeur et leur accorder cette victoire-là ?
La leçon à tirer de cette expérience est sans doute de ne plus être naïf, de savoir que certains êtres sont méchants et nous veulent du mal.
Mais une vie heureuse n'est pas une vie derrière des barreaux de protection.
Je veux continuer à écrire ici, à y verser mon coeur et mon âme en toute liberté, sans craindre le jugement des autres.
Celui à qui je ne plais pas, qu'il passe donc son chemin !
Je ne vais pas m'empécher de vivre la vie qui me tient à coeur.
J'ai perdu un peu de mon innocence certes.
Mais je refuse de regarder le monde à travers les yeux des méchants.
La vie qui vaut la peine d'être vécue est une vie où l'on essaie d'apporter sa parcelle d'amour.
Sa part de lumière.
C'est ce monde-là dans lequel je veux vivre, et non un monde de guerriers fiers et méprisants, semeurs de chagrin et de désespoir.
J'opte donc cette année pour l'amour, non l'émotion qui incline notre coeur vers l'autre, mais la ferme volonté de dépasser les frontières de mon ego, de mes protections dérisoires et d'aller résolument vers l'autre. Les yeux dans les yeux.
« Il nous faut apprendre à vivre comme des frères, sinon nous périrons ensemble comme des imbéciles » Martin Luther King