Méditer sur le corps avec la Ferme des corps

Je regarde très rarement la télévision, mais depuis quelques semaines, je me suis prise de passion pour une série américaine nommé CSI: New York, ou Les Expert Manhattan en français.

Après le visionnage du dernier épisode de la 3ème série, il y avait, en bonus, un documentaire présenté par un des acteurs phares de la série, j'ai nommé Hill Harper (cf photo ci-dessous). Regardez bien cette photo car ce que je vais raconter ensuite est beaucoup moins agréable...

Hill Harper alias Dr Sheldon Hawkes dans la série.

Le documentaire portait sur le ferme des corps de Knoxville dans le Tennessee, qui recueille les corps de donneurs ou des corps non réclamés en vue de l'étude scientifique de la décomposition des cadavres.

"Une ferme des corps (body farm en anglais) est utilisée pour étudier l’anthropologie légale c’est-à-dire l’étude de la décomposition du corps humain après la mort. Plusieurs disciplines légales tirent profit des études faites à travers une ferme de corps, telles que les forces de l’ordre, les médecins légistes et la police scientifique. Ces recherches aident les investigateurs à développer une meilleure compréhension et de meilleures méthodes pour déterminer l’heure exacte d’un décès. Le Bureau fédéral d’investigation américain (FBI) organise des cours de formation à la ferme des corps de l’université du Tennessee afin de familiariser les agents à des scènes de crime où il leur faut exhumer des corps." Wikipédia

Malgré la légèreté et le caractère très scientifique/détaché des intervenants dans ce documentaire, certaines images m'ont soulevé le coeur. Je ne réussissais pas à envisager ces corps sans me dire que c'était le corps d'une personne qui avait été un enfant dont on avait pris soin, qui avait grandi, qui aimé et été aimé/touché/caressé.

Impossible pour moi de les considérer de façon neutre. Ce qui m'a choqué, plus que les asticots, c'est l'expérience qui a été menée avec l'un des cadavres: il a été placé dans une poubelle, la tête en bas, pour reproduire une scène de crime. En soulevant le couvercle, le corps était littéralement liquéfié, une bouillie dont on pouvait prélever un bout à la petite cuillère....

Méditer sur la décomposition était un enseignement du Bouddha pour couper notre attachement au corps physique:

"Asubha est une méditation qui porte sur l’aspect répugnant du corps physique. Bouddha nous a enseigné 10 objets asubha (sur les 40 de samatha). C’est dire que cet aspect des choses est non négligeable.

Les 10 méditations asubha prennent chacune pour objet un cadavre humain dans un état précis et ne correspondent pas seulement à des phases de décomposition différentes. Voici ces 10 objets :
1     cadavre gonflé
2    cadavre brunâtre ou violacé par la pourriture
3    cadavre purulent
4    cadavre séparé en deux
5    cadavre rongé par des animaux
6     parties dispersées d’un cadavre
7     parties découpées au couteau d’un cadavre
8     cadavre au sang coulant
9     cadavre rempli de vers
10   squelette d’un cadavre"

Dhammadanna

Il est étonnant de constater à quel point un corps peut m'apparaitre beau et désirable extérieurement et à quel point son contenu me répugne. C'est une véritable énigme: je hume l'extérieur d'un corps, le caresse, m'en repais, en jouis aussi. Mais l'intérieur de ce corps vivant, chaud, vibrant, me dégoûte.

C'est sans doute la mort qui me répugne derrière cette vie qui palpite.

"Et où est donc la « personne » dans ce tas de chair crue ?" se demande Ajahn Maha Boowa

La sagesse commande de se pencher sur ces images qui nous heurtent. Ces images de la réalité que l'on cherche de toutes nos forces à ignorer.

Méditer sur le corps pour ne pas être dupé par les apparences. Mais tout cela avec respect: il ne s'agit pas de se répugner au point de se supprimer... Cette mésaventure est arrivée du temps du Bouddha à certains moines ayant été par trop dégoutés de leur propre corps.

Ce fut l'occasion pour le Bouddha d'apprendre aux moines la méditation sur le souffle...

Allez, juste pour le plaisir: